Quand nous étions de mauvaises filles

Quand nous étions de mauvaises filles

Auteure : Inma López Silva

Titre : Quand nous étions de mauvaises filles

Genre : roman

Traduit du galicien par Vincent Ozanam

 

Parution : 25 février 2020
ISBN : 979-10-94791-26-4 (broché)
Prix : 21 € (broché)

Acheter

 

Dans un centre pénitentiaire de Galice, au nord-ouest de l’Espagne, se côtoient une prostituée toxicomane, une jeune Colombienne arrêtée à l’aéroport et séparée de son petit garçon, une religieuse condamnée pour ses agissements passés en tant qu’infirmière, une surveillante habitée par le doute et une écrivaine apparemment perturbée, qui ne sait plus trop ce qu’elle invente ou ce qu’elle vit réellement.
Les histoires et les destinées de ces cinq femmes, si différentes et d’une certaine façon si proches, se croisent et se répondent entre les murs de la prison que, chacune à sa manière, elles aspirent toutes à quitter.

Avec une grande variété de registres, ce roman passe de la légèreté à la gravité, de l’humour à l’émotion, du simple récit à la réflexion sur l’écriture, de la parodie sentimentale à l’engagement féministe, de l’invention débridée à la description presque documentaire de l’univers carcéral, des souvenirs d’enfance aux difficultés du quotidien, non sans évoquer aussi des questions sociétales concernant chaque lectrice et lecteur, en Galice, en Espagne et ailleurs.

Née à Saint-Jacques-de-Compostelle en 1978, Inma López Silva a publié, depuis ses débuts précoces voilà plus de vingt ans, des essais sur le théâtre et autour du féminisme, des récits ainsi que des romans.
Paru en 2016, Quand nous étions de mauvaises filles a été réédité à plusieurs reprises en galicien, traduit en espagnol et bientôt en anglais. C’est le premier roman de l’auteure publié en français.

Extraits

Après avoir puni et interrogé, dans cet ordre, mes cousins, elle s’était avancée dans le champ en hurlant mon nom. Je l’avais d’abord entendu très lointain, tout faible. Et c’était bientôt un éclat de voix près de moi, Inma !, qui m’avait tirée de ma parenthèse de solitude et de liberté des cerises. J’avais envisagé un instant la possibilité de me taire et de rester là-haut pour toujours mais, en voyant ma grand-mère me regarder d’en bas, toute, toute petite, tout là-bas, si près de la souche et de la hache, j’avais soudain senti le vertige et la douleur d’estomac que je n’avais pas éprouvés durant tout ce temps où, à l’âge de cinq ans, je m’étais sentie plus libre et plus puissante que jamais.
– Allez, descends, il y a des macaronis.
À cette seconde, l’estomac m’avait lancée.
– Mais je ne sais pas descendre…
– Tes cousins, un de ces jours, je les étrangle.
Elle avait alors disparu dans les ténèbres de la nuit. Dès que je ne l’avais plus vue, j’avais d’un seul coup commencé à ressentir la peur qui n’avait pas grandi de toute l’après-midi. Cette même peur de la parenthèse que j’ai éprouvée tant de nuits en prison depuis la première fois où la porte de la cellule a claqué dans mon dos, juste quand je suis restée à pleurer comme je n’avais pas pleuré le jour où j’étais restée attrapée dans le cerisier. Une peur où se mêlent l’orgueil, la faim, les incertitudes et la sottise.
(…)
Elle avait vingt et un ans la première fois qu’elle est entrée en prison. D’autres décrochent un diplôme à cet âge. Elle s’était introduite dans un de ces énormes bateaux de croisière et elle avait forcé les portes des cabines pour voler les portefeuilles de quinze Suédois et de dix Italiens, et tout aurait pu se passer admirablement s’il n’y avait pas eu une Anglaise à moitié paranoïaque qui avait eu l’idée de lui courir après, elles étaient tombées par terre et, dans la bagarre, Margot avait griffé la dame, et la dame lui avait tiré les cheveux, et Margot alors, comme un acte réflexe, lui avait donné un coup de pied dans l’estomac et, finalement, vu que Margot était une putain et l’Anglaise une professeure de mathématiques à la retraite, on avait considéré que tous les portefeuilles des touristes avaient été volés avec voie de fait. Et c’était de cette manière que le corps frêle et maigrelet de Margot avait atterri à la prison de la Lama (…). De cette première occasion, Margot avait tiré un tas de bons conseils sur la façon dont il ne faut pas voler. Et elle en était sortie, de fait, transformée en la spécialiste qu’elle avait ensuite été.