Le Club du tricot

Le Club du tricot

Auteure : María Reimóndez

Titre : Le Club du tricot

Genre : roman (312 p.)

Traduit du galicien par Vincent Ozanam

 

Parution : février 2016
ISBN : 979-10-94791-04-2 (broché)
Prix : 14 € (broché)

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Six femmes aux origines sociales et aux parcours personnels très divers se retrouvent régulièrement à la maison de quartier d’une petite ville dans le cadre d’une activité « féminine » jusqu’à la caricature : un cours de tricot. Chacune racontant aux autres sa propre histoire à sa façon et avec ses mots, elles parviennent peu à peu à prendre conscience de ce qui les unit, à ébranler leurs certitudes et à desserrer le carcan dans lequel la société les avait enfermées. D’étranges décès accidentels défraient alors la chronique locale ; curieusement, ils ne touchent que des hommes…

María Reimóndez est l’une des plus intéressantes représentantes de la jeune littérature galicienne, ouverte aux nouveautés de l’époque tout en restant solidement enracinée dans sa culture et sa langue, au confluent – mais aussi à la périphérie et à l’écart – de l’espagnol et du portugais.

Extrait

– Ça ne tourne pas rond dans ta tête ou tu t’es pris un coup ? – ainsi avait-il accueilli la nouvelle qu’elle allait arrêter les ménages et ouvrir une boutique de laine.
– Je te laisse le choix, lui avait-elle répondu.
– Je ne te donnerai pas un sou ! avait-il hurlé, la bouche pleine.
– Et qu’est-ce que j’en aurais fait ? – Matilde avait pris une décision et n’allait pas revenir dessus.
– Moi, je ne veux rien savoir de tout ça ! – Manuel continuait de brailler, mais cela lui était bien égal. C’était seulement une partie de la bataille, et la moins importante en fin de compte. La partie qui se déroulait au grand jour. Et elle avait déjà assumé qu’elle n’avait aucune aide à attendre de ce veau. La guerre à mener était ailleurs. Mais elle savait qu’elle la gagnerait elle aussi.
– À partir d’aujourd’hui si tu veux tu te fais à manger – c’était le soir, elle était rentrée à la maison et elle s’était préparé son repas. Manuel était entré dans la pièce en beuglant, comme toujours. Mais il n’y avait rien pour lui sur la table. On avait dû entendre les hurlements dans tout l’immeuble. Jour après jour. C’était facile pour Matilde. Elle se concentrait sur ses affaires. De temps en temps elle avait mal à la tête, mais elle était sûre qu’elle y arriverait si elle supportait la chose comme elle savait le faire. L’autre n’allait pas mourir de faim et puis il avait bien deux bras et deux jambes. Elle s’était mise à dormir dans l’autre chambre. Elle y avait emporté tous ses habits et elle ne nettoyait plus les toilettes qu’une fois tous les quinze jours. L’hostilité grandissait. Tous les jours, Manuel hurlait encore et encore. Mais Matilde se sentait la force d’un éléphant.
Un jour, alors qu’elle tricotait et qu’il hurlait, Manuel l’avait attrapée par les épaules et l’avait secouée :
– Si tu ne changes pas de comportement, je te tape dessus jusqu’au moment où tu ne bougeras plus – Matilde avait levé les yeux de son ouvrage. Il y avait eu un instant de silence tandis qu’elle sentait la fièvre lui monter dans la gorge. Elle avait posé son tricot sur le canapé et lentement, l’air décidé, elle s’était levée.
– Ose donc et on verra lequel ne bouge plus.